Comment la Ville de Paris traite (ou pas) la souffrance au travail (1/3) (02/03/2015)
Officiellement tout le monde en convient, la souffrance au travail doit être prévenue et lorsqu'il est trop tard, combattue.
Prenons le chapitre 1.4 du guide des risques psychosociaux (RPS), cité dans notre précédent article sur la maltraitance managériale. Il traite des "rapports sociaux au travail" entre collègues, avec la hiérarchie, les usagers, les prestataires, les relations entre l’agent et l’organisation qui l’emploie, notamment l’attention portée aux conditions de travail. Il y est mentionné que la dégradation des rapports sociaux peut avoir des effets délétères sur la santé et la sécurité des agents et leur bien-être au travail.
Les principaux facteurs de RPS identifiés sont nombreux, parmi lesquels l'impossibilité de coopération, le soutien non satisfaisant dans les situations difficiles ou lors des périodes de changement, le soutien technique non satisfaisant de la part des supérieurs, l'incivilité au sein du service, l'absence de solidarité, l'attitude de la hiérarchie inappropriée en cas de conflit, la violence interne, etc.
Ainsi, on peut noter que le problème est bien posé, il ne se limite pas à l'agent et implique l'organisation toute entière. Son traitement devrait donc aussi concerner cette organisation. Reconnaissons que cela n'est pas simple. Par exemple, comment agir quand les facteurs cités ci-dessus se cumulent ?
Alors dans les faits, qu'en est-il ?
Quelques situations sont résolues. Il serait intéressant d'en analyser les raisons. Soutien de la hiérarchie, du service (et/ou de la direction) des ressources humaines, des collègues, de la médecine professionnelle, de la cellule d'urgence psychologique (qui peuvent se cumuler aussi). Ou bien départ de l'agent ? Départ par mutation, démission, arrêt maladie de longue durée pour dépression, ... ?
L'écoute, dès lors qu'elle est active et bienveillante et non un soutien de façade, est une première étape essentielle mais non suffisante. Quelles propositions concrètes sont engagées par l'administration pour résoudre durablement le problème ?
Changer de poste, dans l'intérêt de l'agent cela va de soi ! Cette proposition récurrente de la part de l'administration, qui propose généreusement son soutien pour y parvenir très vite, permet de résoudre le problème immédiat ... si toutefois l'agent est d'accord. Mais est-il en capacité de faire des choix éclairés dans ces conditions ? Par ailleurs, quelles sont les mesures prises pour s'assurer que les mêmes difficultés ne se reproduisent pas ? Car s'en tenir à un changement de poste, c'est considérer que le "problème" vient de l'agent. C'est refuser de s'interroger sur son entourage professionnel (ses collègues, sa hiérarchie, ...), sur les relations et l'organisation du travail, alors même qu'ils sont identifiés dans le guide des RPS. Combien d'enquêtes administratives ont honnêtement été menées dans les cas connus et avérés, parfois concentrés au sein d'un même secteur, de souffrance au travail ?
Autre proposition plutôt fréquente : la médiation interne. Elle implique que toutes les parties soient d'accord, ... et que le médiateur soit neutre. Or très souvent, les médiateurs sont des chefs de service ou de bureau, et le fait que le médiateur retenu ne soit pas celui du service concerné par le conflit ne garantit en rien sa neutralité et son objectivité. Parfois, eux-mêmes ont d'ailleurs oublié la base même de la procédure de médiation et reçoivent les agents en tête à tête de sorte que d'une part le conflit n'est pas résolu et d'autre part il a toutes les "chances" de s'amplifier. Le "diviser pour mieux régner" a encore de beaux jours devant lui !Il faudrait enfin fixer un cadre, savoir dire STOP. Car c'est bien connu "la meilleure défense, c'est l'attaque" ! Pour cela il faudrait être à même de pouvoir déceler les personnalités manipulatrices - parce qu'on ne vit pas dans un monde de Bisounours et qu'à la CFDT nous agissons pour un syndicalisme responsable et refusons d'apporter un soutien inconditionnel - mais hélas les médiateurs internes ne sont pas formés à cela !
La CFDT est à l'écoute des situations d'agents en souffrance au travail. Elle peut vous soutenir dans vos démarches et vous garantit la confidentialité des échanges.
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